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12- Ce dont on ne peut parler il faut le taire mais ce que l’on ne peut concevoir faut il l’oublier ?
120- Vers l’an 1920, dans un espace médiatique tourné vers l’effervescence des découvertes en physique quantique, un philosophe particulier apparaît, « Ludwig Wittgenstein ». Un philosophe du langage qui interrogea la nature du sens exact de ce que l’on dit. Sa redéfinition du langage tombe à point avec la réinterprétation de la physique purement laplacienne. « Que peut-on dire, et comment devons-nous le dire ? », clarification nécessaire pour aborder une nouvelle approche du monde quantique en apparence contradictoire, simultanément discret et continu, déterminé et a-déterminé. Wittgenstein, barycentre de l’école de Vienne, introduit la logique formelle dans le langage philosophique, en éditant en 1921 le « Tractatus logico-philosophicus », espérant une base logique et solide de la pensée. Dans une démarche néopositiviste, clarifiant le langage philosophique par le développement de la logique propositionnelle, comme Albert Einstein l’avait voulu avec sa variable cachée, pour garder une base déterministe à la physique. Fils d’un maître de forge, passionné par l’Art et l’Esthétique, il est issu d’une grande famille viennoise d’artistes. Son caractère fit qu’il remarqua la parenté entre art et philosophie. Lecteur de Goethe, dont il a particulièrement apprécié sa « Théorie des couleurs », il se trouve en opposition avec Hegel sur les questions d’Esthétique. L’« Idéalisme » d’Hegel comporte une forme de relativisme qui ne peut lui convenir, partant du fait que la « Syllogistique aristotélicienne » dont se réclame Hegel compare des propositions de nature différente et parfois incompatibles. Dans son idée, il imaginait une philosophie débarrassée de ses incohérences, se déployant en « Aphorismes » magnifiques tels des fragments d’essence héraclitéenne. « La philosophie, on devrait, pour bien faire, ne l’écrire qu’en poèmes », disait-il. Père de la philosophie analytique anglo-saxonne. En 1924, avec Bertrand Russell, il pose le principe de l’ontologie des faits atomiques en tant que composition d’objets simples constituant l’atomisme logique ; les propositions logiques adoptant les mêmes règles.
121- Il ne s’agit pas seulement d’une nécessité logique discursive qui se déroule toute entière autour des propositions ; la logique, selon lui, possède une réalité plus vraie et plus réelle que le monde réel lui-même et reflète l’essence immuable du monde. Il en vient, à la fin du « Tractatus logico-philosophicus », à déclarer : « Ce dont on ne peut parler, il faut le taire. » Sa conclusion n’est pas pour restreindre la sphère du langage, mais pour distinguer les limites du langage logique avec les autres « jeux de langages », sphères langagière comme celle des croyances, du langage trivial du quotidien, de la sphère professionnelle et d’autres encore, répondant à des règles et des mécanismes différents. Son revirement en 1930 à l’encontre du « Tractatus », constatant que certaines constructions propositionnelles n’étaient pas décomposables en faits atomiques, sonna la fin de cette doctrine. Il en vint par la suite aux « Investigations philosophiques » qui lui permirent de constater que finalement, il faut considérer une proposition comme le support d’une image que nous apposons sur la réalité pour l’interroger, tout en prenant la forme d’une réalité détachée visant le symbole ainsi figuré.
122- Nous sommes en 1927 et le monde de la science commençait sans le savoir sa mue fondamentale dans la même mesure qu’a été fondamentale la révolution copernicienne. La science qui s’est voulue objective depuis les fondements posés par le grand sage Thalès était confrontée désormais à la complexité. Un paradigme de la complexité théorisé par Gaston Bachelard en 1934 traduit bien ce qu’a été la conquête de la matière. Ainsi, dans le même temps que Schrödinger, Einstein et de Broglie s’opposaient à la vision de Bohr, Pauli, Heisenberg et Born sur la nature de la nouvelle réalité quantique, il y avait le fait de l’impossibilité épistémologique de concilier les multiples aspects de l’image intime de la matière que la nouvelle science quantique commençait à révéler. La science obtenait un état ondulatoire de la matière avec un dispositif modélisant le substrat espace-temps du processus opératoire, corpusculaire quand le dispositif mettait en évidence l’enchaînement causal du mouvement et transitoire quand l’expérience tenait compte de l’évolution des « variables canoniques » (couples espace-temps de chaque point du système). De plus, il y eut l’introduction d’une « incertitude structurelle » mise en évidence par Heisenberg, du fait de l’interférence des sondes d’observation dans leurs expériences et quelle qu’en soit leur nature confrontée à l’action de la relativité restreinte dans la scène, détruisant la précision des résultats. Il faut y ajouter l’impossibilité d’obtenir une représentation formelle solide et complète de ces expériences, mise en évidence par le théorème d’incomplétude de Gödel qui prédit une tautologie plus une contradiction au bouclage de tout système logique et formel.
123- Comble de la fatalité, notre langage articulé ne répond pas à des processus logiques mais se trouve mû par des croyances et des désirs. Ainsi, de la dépendance de l’image du monde obtenue selon les méthodes opératoires envisagées naît la notion de « Complexus », connexion entre processus hétérogènes : science des systèmes, science de l’information, processus de computation, plus science de la modélisation, processus de cognition menant avec Norbert Wiener en 1947 à la notion de cybernétique. Ce mouvement s’accentue et produit les nouvelles sciences du futur comme la science des systèmes, initiée plus tard par Heinz von Foerster, appelée systémique ou seconde cybernétique. Grand contributeur également du mouvement constructiviste mathématique et psychologique. Le constructivisme psychologique et philosophique est une branche des sciences qui repose sur l’idée que notre image de la réalité, ou les notions structurantes de cette image, sont le produit de l’esprit humain en interaction avec cette réalité, impliquant les notions de psychométrie et non le reflet exact de la réalité elle-même. Et c’est aussi le cas pour n’importe quelle espèce animale dans son biotope.
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