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42 – Que nous restent-il ? Le langage, la « linguistique du Chaos ! »
420- Le langage nous conditionne et notre conditionnement produit à son tour du langage. Pas de pensée sans icônes et indices, mais pas de pensée faite exclusivement d’icônes. La communication idéale pourrait s’inspirer de ce principe : pas de communication authentique sans sentiments et sans conscience existentielle du principe ego/non ego, mais pas non plus de communication authentique qui serait faite de purs sentiments ou actions sans une certaine exigence de réflexivité. L’image mentale est comme un sous-ensemble relativement indépendant à l’intérieur de l’être vivant sujet ; à sa naissance, l’image est un faisceau de tendances motrices, anticipation à long terme de l’expérience de l’objet ; au cours de l’interaction entre l’organisme et le milieu, elle devient système d’accueil des signaux incidents et permet à l’activité perceptivo-motrice de s’exercer selon un mode progressif. Enfin, lorsque le sujet est à nouveau séparé de l’objet, l’image, enrichie des apports cognitifs et intégrant la résonance affectivo-émotive de l’expérience, devient symbole. De l’univers de symboles intérieurement organisé, tendant à la saturation, peut surgir l’invention qui est la mise en jeu d’un système dimensionnel plus puissant, capable d’intégrer plus d’images complètes selon le mode de la compatibilité synergique. Après l’invention, quatrième phase du devenir des images, le cycle recommence, par une nouvelle anticipation de la rencontre de l’objet, qui peut être sa production. Selon cette théorie du cycle de l’image, imagination reproductrice et invention ne sont ni des réalités séparées ni des termes opposés, mais des phases successives d’un unique processus de genèse, comparable en son déroulement aux autres processus de genèse que le monde vivant nous présente (phylogénèse, ontogenèse, processus d’émergence). Selon l’opinion de chaque asserteur, croire en ce qu’on dit n’est pas une garantie suffisante pour qu’une communication s’instaure. Certes, les sujets ont une certaine conscience du sens de leurs croyances et propos, et peut-être même leur ont-ils attribué de la signification au plan de leur histoire personnelle : ils se sont montrés curieux de comprendre leurs propres opinions et comportements. Mais cela n’implique pas qu’ils aient éprouvé de l’intérêt pour d’autres qu’eux-mêmes. Chaque acte réel de communication, interindividuel ou de masse, exige de comporter cette dimension de curiosité et d’empathie pour l’interprète (singulier ou collectif) et cet investissement physique et intellectuel dans l’élaboration de l’interprétant final qui a assez de force pour identifier le recours à une habitude jugée bonne ou au contraire pour imposer comme nécessaire un changement de l’habitude antérieure. Nous en venons à l’opposition de « La Lingua Tercie Impéritie », symbole du Royaume de Tullé fantasmé dans « mein kampf », du dévoiement des Atrides, de la manipulation des notions de vérité, de bien et de mal, de l’institution de la pensée autoritaire qui est de nature axiomatique (sans discussion) contre « La Lingua Cosmica », la langue des nomades qui s’exprime de manière théorématique puisqu’elle problématise et suggère. Ainsi, il nous manque les mots de la colère, les mots de l’amour et les mots de l’au-delà suffisants et suffisamment exprimés pour une véritable communication. Il nous faut de plus la maîtrise de la Sémiotique, de la Déixis, de la « Communication Non Violente » et des Gestualités attenantes pour constituer les linéaments de cette Lingua Cosmica, appelée aussi « The AO », une antidote à l’enfermement et à la corruption de la pensée autoritaire. Dit autrement, la langue cosmique est plus forte et plus intense que la langue de l’empire.
421- La série fantastique du même nom de Brit Marling et Kingsley Ben-Adir « The AO » relate l’aventure d’un groupe de dériveurs des mondes utilisant par un accord collectivement interprété dans l’éther subtil du réel, un bal combiné de mouvements multi-sémiques de leurs corps, de leurs attitudes, de leurs chants gutturaux, de leurs esprits harmonisés en un lieu et moment clés. Ce qui faisait correspondre à la mort de chacun d’eux, la renaissance en un autre lieu clé et moment clé de ce même esprit l’entraînant dans une dérive cosmique d’Univers multiples à la poursuite d’un amour dont la rencontre est toujours reportée. Le paradigme cosmique, apparu bien avant que le premier spoutnik soit lancé en 1957, comprenant une composante astronomique, mythologique, littéraire, scientifique et science-fictionesque, mais aussi linguistique qui alimentait les samizdats du monde soviétique, constituait malgré tout la base de « La langue » du cosmos. Cet ensemble fut élargi en Russie à une composante politique, la Révolution étant perçue comme un phénomène d’ordre cosmique. Ce paradigme s’est manifesté dans la création de la première « Lingua Cosmica » : la langue AO, créée par V. Gordin en 1920, comme langue de communication internationale, sur des bases strictement aprioristes. En 1927, cette langue fut présentée à l’exposition des voyages interplanétaires comme une langue de communication cosmique. Le fondement idéologique de la langue AO était une branche particulière de l’anarchisme, ses formes matérielles étant liées aux mêmes sources que celles de la poésie futuriste, de l’Ontologie anarchiste ou du terrorisme poétique. Actuellement, la lingua cosmica fait le lien entre les fameux projets SETI et le récent METI, il s’agit ainsi de fonder une langue sur des principes supposés universels, en l’occurrence la logique et ses opérateurs : conjonction (« et »), disjonction (« ou »), implication, négation, itération, etc. Selon Noam Chomsky, le langage naturel possède des fondements logiques répondant aux exigences du tableau de Mendelev présent dans l’ensemble de l’Univers (c’est-à-dire de la nécessité vitale émergente des éléments). Toute chose produisant son contraire et le négatif étant le sous-jacent du positif, une remarque s’impose sur le caractère logique ou illogique des langues naturelles. La logique formelle met en œuvre des opérateurs comme la négation, des variables comme « x » et « y » dans la formule « x-y » et des prédicats comme « f » dans « f(x) – y ». Les langues naturelles semblent posséder des équivalents : la négation « ne … pas » ressemble à la négation logique, tandis qu’un verbe avec un sujet semble fonctionner comme un prédicat appliqué à une variable. Des rapprochements entre logique et langue naturelle ont donc été faits et continuent à être explorés, notamment en logique propositionnelle. Mais dans les deux cas, la première ne peut absolument pas être réduite à la seconde : s’il y a bien des similitudes, le fonctionnement n’est pas identique. Pour s’en convaincre, prenons l’exemple de l’implication « s’il pleut alors la route est mouillée ». La négation linguistique de celle-ci est souvent énoncée « s’il ne pleut pas alors la route n’est pas mouillée », alors que sa négation logique est « il pleut et la route n’est pas mouillée », ce qui n’a strictement rien à voir et apporte une ouverture supplémentaire à l’expression. Il s’agit de systèmes de signes. Le linguiste Frédéric Landragin nous donne un exemple du premier cas de langue synthétique. C’est le « laadan » construit en 1982 par Suzette Aden Elgin pour son roman Native Tongue. Le but de cette langue est clairement féministe et consiste à rendre compte, dans une langue artificielle, du vécu des femmes, de leur univers et de pensées non machistes. Le roman met en scène des personnages féminins qui développent leur propre langue secrète, dans un monde où les femmes ont été privées de leurs droits civils. Cette langue leur servira pour communiquer avec des aliens. Il s’agit d’une langue agglutinante avec des tons. Elle comprend 36 pronoms personnels afin de traduire différents types de relations sociales et affectives entre les locuteurs. L’autrice a publié toutes ses ressources dans un livre intitulé « A first Dictionary Grammar of Làadan » et a également écrit des ouvrages sur l’auto-défense verbale, confirmant ainsi l’origine militante du làadan. « Il y a des philologues qui concoctent une langue élaborée, unique, pour la convergence. Les racines, inflexions même les gestes. Les gens l’apprendront et la parleront. Une langue qui nous permettra d’exprimer des choses que nous ne savons pas exprimer aujourd’hui, de voir des choses que nous ne voyons pas encore, de nous voir nous-mêmes et les autres d’une manière qui nous unisse et élargisse tous les possibles. »
422- Charles Sanders Peirce, initiateur de la Sémiologie, a conçu, outre une méthode de rédaction de l’enquête scientifique, d’assez nombreuses propositions théoriques, plus ou moins développées, dans des domaines aussi variés que la logique ou la sémiotique, la philosophie, la géodésie, les mathématiques. Si l’on en croit Philippe Breton, la conception moderne de la communication naquit sur des bases sémiotiques Peirciennes, pourrait-on dire, en 1942. Des chercheurs venant d’horizons aussi divers que la cardiologie, la neuro-physiologie, l’ingénierie du téléphone, l’électronique, les mathématiques et l’anthropologie (représentée par G. Bateson) mirent alors au centre de leurs discussions une proposition de Norbert Wiener avec laquelle il s’agissait de focaliser la théorisation naissante de la communication sur la régulation, le contrôle et le commandement, non pas pour favoriser l’instauration d’un régime autoritaire, mais bien au contraire en vue de créer des garde-fous contre les totalitarismes. Les années passant, ce seront des acteurs sociaux non scientifiques qui appliqueront la notion de communication à l’analyse et à l’action politiques et sociales. L’idée visée était celle d’une autogestion de communautés de petite taille dans lesquelles serait développée une conception nouvelle de l’homme et de la nature du lien social, fondée sur la fraternité. En effet, la barbarie de l’idéologie nazie avait réanimé un idéal utopique du XIXème siècle, lequel est peut-être en train de resurgir dans le domaine associatif en ce début du XXIème siècle après l’insistance de la perversion narcissique. L’idéal d’un changement social qui ne serait fondé ni sur l’exclusion sociale, ni sur le renforcement de l’état paraît nécessaire et difficile. L’Homo communicans en notre XXIe siècle, selon Wiener, n’était plus le centre de l’univers de la période des lumières, duquel tout part et vers lequel tout converge. Il était devenu un être sans intérieur, sans corps propre, vivant dans une société sans secrets, pleinement tourné vers elle-même, un homme vivant seulement par l’information et l’échange, dans une société rendue transparente par les nouvelles machines à communiquer. En refusant de considérer l’homme comme un individu isolé, Wiener fondait ainsi une nouvelle anthropologie, elle-même fondée sur l’égalité entre les hommes, partenaires dotés du même poids de complexité, grâce à leur capacité de pensée rationnelle. Convaincu par ailleurs que le raisonnement artificiel, ancêtre de l’informatique, dépasserait rapidement la performance mentale des humains, Wiener lançait déjà le concept d’intelligence artificielle dès 1945. Des machines intelligentes devaient être autorisées à devenir nos partenaires en communication et se voir ainsi attribuer de pleines responsabilités en matière de contrôle et de prise de décision de façon à permettre à la société d’accroître son auto-contrôle grâce à un réseau d’information couvrant la planète. Ce programme portait des traces de l’héritage anarchiste, mais d’un anarchisme rationnel. Cela semble une belle Utopie. Le langage humain est un système de signes complexe représentant tous les systèmes de signes langagiers possibles couvrant toute la planète, de telle manière que dans le cadre d’un contact du quatrième type, à tout langage « alien » correspondrait au moins quelque part sur terre une base d’un système de langage correspondant. La complexité de notre langue de racine indo-européenne tient à sa nature en double articulation qui en fait une langue dite flexible représentant une bonne préposée à la pleine communication. Elle nous permet toutes les péripéties au travers de ses six fonctions particulières : la fonction incitative ou conative et performative (« Fait-le ! »), référentielle (« vois ce ciel »), expressive (« ouf ! »), phatique (« il est branché ? », « Hého ! es-tu dans le game ? »), poétique (« Éthique et tic »), métalinguistique (« quand on dit ça, est-ce bien cela ? »), plus des possibilités de dénotations et connotations, sa capacité à s’articuler à tout système de signe et de les transposer en tout système scriptural, d’où provient notre pouvoir technologique. Ainsi, elle possède sa boîte à outils qui nous permet de construire une dialectique pacifique et progressiste.
423- Le Lexique : L’étendue du lexique participe de la résolution du monde comme il participe à la résolution du langage. Dans l’océan des formes et des formules que peut prendre un mot ou une expression, on constate rapidement que le mot n’est pas l’élément unique du lexique. Le lexique est constitué également d’acronymes, d’abréviations, d’expressions toutes faites et d’images métaphoriques composées. Le recours au lexique est indispensable et c’est par sa maîtrise que nous améliorons notre résolution au monde. La langue française comprend environ 50 000 mots pour la sphère de langage courant, mais nous n’en employons que 1500 à 3000 dans notre quotidien. Nous pourrions dire que les mots que nous gardons dans nos dictionnaires servent surtout aux écrivains et aux poètes. Les mots ont du poids et nous engagent, nous attribuons des noms aux choses de notre existence, nous appelons nos animaux domestiques d’un nom affectif et rejetons les autres par le qualitatif de proie pour les chasser. Rappelez-vous, dans la « Lingua Tertii Impéritii », V. Klemperer écrivait au début de l’accession du nazisme au pouvoir tout ce qui a trait aux mots : germanisation des noms de lieux, prénoms donnés ou imposés aux enfants (prénoms supposés germaniques ou supposés juifs selon les cas). C’est le premier critère de l’esprit autoritaire, à l’opposé de la « Lingua Cosmica » qui trouve et combine des nuances dans les mots apposés aux choses et aux expressions de la vie, le faisant de façon subtile, pertinente et non caricaturale.
La Phonétique : Les langues humaines caractérisent au niveau mondial 920 phonèmes distinctifs, produits par des articulations du système vocal soit par obstruction, friction, contacts de la langue ou mouvements de lèvres telles les langues à clic ou les langues sifflées. C’est elle qui détermine les accentuations dans la structure des mots et des expressions. Parler distinctement demande un effort dans le maniement de la langue des lèvres et du palais, on la rencontre quand nous devons faire un effort pour acquérir une nouvelle langue ou communiquer avec un étranger dans un échange d’éléments de langage. La bonne prononciation est un acte de politesse vis-à-vis d’autrui. Par contre, la LTI euphémise la langue et ses intonations, invente peu de mots, en change le sens, les retourne, ce sont des formules empruntées et pourtant tout est nouveau et appartient pour toujours à la LTI.
La Prosodie : La prosodie organise des pauses dans le discours pour laisser parler les mains, faire le choix de la formulation à employer par la suite ou laisser passer les anges. C’est aussi la façon d’interpréter la mélodie de la phrase. Elle constitue les accents et les particularismes. Elle y inclut l’intonation qui permet de traduire les graduations : interrogation, assertion, affirmation. Elle est le reflet du principe de génération de variabilité éminent chez l’être humain dans les mécanismes de l’évolution.
La Morphologie : Le morphème est le plus petit élément significatif d’un mot mais c’est aussi celui qui permet la flexibilité de la langue. Par un jeu permanent sur la langue, ces morphèmes tentent des ouvertures. « La grammaire novlangue renfermait deux particularités essentielles. La première était une interchangeabilité presque complète des différentes parties du discours. Tous les mots de la langue (en principe, cela s’appliquait même à des mots très abstraits comme « si » ou « quand ») pouvaient être employés comme verbes, noms, adjectifs ou adverbes. Décidément, la novlangue, pure création de Goebbels, mélangeait de nombreux aspects morphologiques de notre langage ! La thèse de Sapir-Whorf émet l’hypothèse que les mots que l’esprit exprime le conditionnent en retour. Dans un univers qui connaît le voyage temporel, la langue reflète nécessairement les multiples possibilités offertes par cette technologie. L’une des difficultés majeures soulevées par le voyage temporel n’est pas de devenir accidentellement son propre père ou mère. Devenir son propre père ou mère ne soulève normalement pas de difficultés du fait que les états névrotiques spécifiques à chaque famille se communiquent au travers les générations. Ce ne sont des difficultés que ne peuvent surmonter une famille équilibrée et large d’esprit. Changer le cours de l’histoire n’engendre pas non plus de problème particulier : le cours de l’histoire demeure immuable parce qu’il se replace de lui-même comme un puzzle. Considérer une Uchronie où l’attentat contre Adolf Hitler aurait réussi ou même que son existence ne fût, un Hector Gliker aurait joué son rôle. Non, la difficulté majeure est essentiellement d’ordre grammatical et l’ouvrage principal en la matière serait le manuel de conjugaisons à l’usage du voyageur temporel. Il vous indiquerait comment décrire un événement qui ayant failli vous advenir dans le passé avant que vous ne l’évitiez par un saut de deux jours dans le futur pour y échapper, par l’utilisation du Passé antérieur surcomposé du subjonctif futur semi-conditionnel plagal 2e forme. La morphologie d’une langue évolue sans cesse avec les avancées conceptuelles de sa société.
424- La Syntaxe : Elle constitue les accords de la morphologie, c’est sa mécanique interne, les règles de bon usage de la phrase, la politesse des mots. Elle permet de lever les ambiguïtés de la phrase quand les compléments d’objets directs se multiplient, d’autant plus dans une structure d’enchâssement de propositions, et permet de retrouver l’ordre des assertions. La LTI n’hésite pas à y insérer des insinuations pour en conserver le flou.
La Sémantique : Le mot est de nature polysémique, la sémantique consiste à identifier les traits sémantiques minimaux. Le champ sémantique d’un mot est l’ensemble des sens pris par un même mot à un moment donné et forme une constellation. Ainsi, de la conscience langagière de Chept, on en vient au champ sémantique et à son développement. La théorie des champs sémantiques postule que tous les systèmes, vivants et matériels, ont un niveau d’organisation sémantique et pose ainsi la conscience comme une énergie non-locale, fondamentale dans l’univers. (Petit rappel) :
Le champ sémantique est constitué de constellations. De constellations de relations à la totalité. Elle forme la consistance même de la conscience et elle est ce que l’histoire en a fait. Une constellation possède une structure complexe. Elle est en lien avec les représentations de l’individu, de son langage, sa psychologie et ses croyances. Elle se fixe sur un objet qui la signifie (relation signifiant-signifié). Elle est issue d’une combinaison d’une conscience sémique universelle (le champ blanc sub-quantique) et de la conscience langagière, du système de signes lié à son propre biotope. Une constellation possède la conscience d’elle-même. Elles impliquent tout le soma de l’individu et son intégralité mémorielle, la relation intime de la psyché avec son soma, la capacité de cette psyché d’échapper à elle-même et enfin de l’esprit d’une totalité qui réunit l’individu. Une constellation est constituée d’une multitude de relations au monde et au Soi convergeant vers des représentations archétypales correspondant à des actes et à des dires dans l’univers social. Elle n’existe qu’à travers les liens qu’elle comporte suite aux actions, puis aux propos et au travers des espoirs émis liés au groupe d’appartenance de l’individu. Elle constitue des moments clés et des lieux clés qui nous définissent. Le sens étant toujours double et toujours mouvant, les constellations n’ont de sens que pour un instant donné et se renouvellent sans cesse, rencontrant parfois des sauts quantiques (étant conforme à la mécanique des champs). La dimension sémantique selon Christine Hardy comprend donc les réseaux de significations vivantes (en tant qu’énergie créatrice) que les êtres humains nourrissent et créent. Elle est en perpétuelle évolution, reflétant le paysage psycho-mental changeant de l’humanité car, mémoire vivante planétaire et tension vers le futur, elle est aussi modifiée et énergisée par chaque nouvelle création de sens. Nous arrivons ainsi à entrevoir la conscience collective comme un gigantesque réseau dynamique et sémantique organisé. L’organisation naturelle de l’esprit vivant montre ainsi une flexibilité dynamique très grande, de l’auto-organisation, et des processus de changement et d’évolution, de connexions spontanées, d’inter-influence (contrairement aux modèles cognitifs logiques et mécanistes). Ces dynamiques complexes mettent en œuvre : l’interaction et l’interprétation des constellations sémantiques entre elles, la multitude de connexions possibles en réseau, l’innovation, la pluralité et la dissimilarité, les turbulences et les patterns sous-jacents, et bien sûr les seuils de transformation et de mutation brutale : les bifurcations, propagations, changements d’attracteur, et émergence de « catastrophes formelles » décrites par la théorie de la forme et du chaos. La sémantique générale est une science qui s’intéresse au contenu du message dans son entier. Elle permet de reconstituer l’ensemble des relations logiques de la syntaxe afin de débusquer les renversements de sens que la LTI aime à instrumentaliser à son profit. La sémantique est encadrée par la syntaxe et la pragmatique. Ainsi, par sa maîtrise, on aboutit à la formulation inventive de métaphores, de métonymies et de synecdoques qui fleurissent et embellissent nos énoncés, puis au langage poétique.
La Pragmatique : La pragmatique étudie les rapports entre l’usage qui est fait de la langue et la situation dans laquelle cet usage intervient. Elle se constitue d’une pragmatique de premier niveau, la Déictique, savoir désigner et nommer les choses. D’une pragmatique de second niveau, l’implication, ce sont les signes de l’acceptation de ma responsabilité dans les événements du monde. D’une pragmatique de troisième niveau, le performatif : les assertions, les ordres et les questions.
La communication non violente (CNV) rassemble les trois niveaux de la pragmatique, elle procède d’un élan du cœur provenant de notre noyau rythmotopologique. J’exprime avec honnêteté comment je me sens à mon rythme, sans formuler de reproches ni de critiques de ma part ni de ta part, et j’écoute avec empathie comment tu te sens, sans entendre de reproches ni de critiques de ma part ni de ta part. Elle se constitue par quatre actions. Premièrement, l’observation, c’est ce que j’observe, vois, entends, me rappelle, imagine sans y mettre d’évaluations, qui contribue ou non à mon bien-être avec ce que tu observes, vois, entends, te rappelles, imagines sans y mettre d’évaluations, qui contribue ou non à ton bien-être. La suspension du jugement des Stoïciens. Deuxièmement, les sentiments, c’est comment je me sens par les émotions ou sensations plutôt que par la pensée par rapport à ce que j’observe et comment tu te sens par les émotions ou sensations plutôt que par la pensée par rapport à ce que tu observes. Troisièmement, les besoins, c’est ce dont j’ai besoin ou qui touche à mes valeurs, plutôt qu’une préférence ou une action précise qui éveille mes sentiments, c’est aussi ce dont tu as besoin ou qui touche à tes valeurs plutôt qu’une préférence ou une action précise qui éveille tes sentiments. Je me demande clairement ce qui pourrait embellir ou enrichir ma vie sans que cela soit une exigence. Je reçois avec empathie ce qui pourrait embellir ou enrichir ta vie sans en entendre une exigence. Quatrièmement, l’expression de nos demandes, ce sont les actions concrètes que j’aimerais voir réalisées et les actions concrètes que tu aimerais voir réalisées. Certaines façons de communiquer nous coupent de notre bienveillance naturelle. Dans le monde des jugements, notre intérêt se porte sur qui est quoi (le réflexe d’essentialisation). Notre analyse d’autrui est faite de l’expression de nos propres besoins et sentiments. C’est le phénomène de projection. Cataloguer et juger les autres favorisent la violence. Les comparaisons sont une forme de jugement. Notre langage nous empêche de voir clairement notre responsabilité personnelle. Ainsi, nous pouvons remplacer le langage impliquant une absence de choix par un langage qui reconnaît le choix. Nous sommes dangereux quand nous ne sommes pas conscients que nous sommes responsables de nos actes, de nos pensées et de nos sentiments. Il n’est pas en notre pouvoir de faire faire quelque chose à quelqu’un. Penser à qui mérite quoi bloque la communication empathique. La communication aliénante a malheureusement des racines philosophiques et politiques très profondes. Les deux parties de la CNV sont : s’exprimer avec sincérité et accueillir la parole de l’autre avec empathie.
La présence, c’est ne te contente pas d’agir, sois là. L’empathie, c’est faire le vide dans notre esprit et écouter de tout notre être. Quoi que disent les autres, n’entendre que ce qu’ils observent, leurs sentiments, leurs besoins, ce qu’ils demandent.
Écouter ce dont nos interlocuteurs ont besoin plutôt que ce qu’ils pensent de nous. La douleur est un obstacle à l’empathie. Nous avons besoin d’empathie pour en donner. Être empathique plutôt que répliquer à une personne en colère. Lorsque nous écoutons leurs sentiments et leurs besoins, nous ne voyons plus les individus comme des monstres. Répondre à un refus avec empathie nous évite de le prendre mal. Pour redonner vie à une conversation, interrompre de façon empathique. Les propos qui ennuient l’auditoire ennuient aussi l’orateur. L’orateur préfère être interrompu plutôt que l’on fasse semblant de l’écouter. Souvenons-nous de ce qui nous rend uniques. En fait, la CNV pourrait servir avant tout à développer notre bienveillance envers nous-mêmes. Nous utilisons la CNV pour nous évaluer de manière à grandir et non à nous haïr.
425- Éviter les « je dois » ! Traduire les jugements envers nous-mêmes et nos exigences intérieures. Les jugements vis-à-vis de nous-mêmes, comme tous les jugements, sont des expressions tragiques de nos besoins insatisfaits. Ne faisons rien si ce n’est par jeu ! Dans nos actions, soyons animés par le désir de contribuer à la vie plutôt que par la peur, la culpabilité, la honte ou l’obligation. Traduire « je dois » en « je choisis ». Chaque fois que nous faisons un choix, soyons conscients du besoin qu’il sert. Cultivons la conscience de l’énergie qui motive nos actions. Le comportement le plus dangereux de tous consiste à faire des choses « parce qu’on est censé les faire » ; c’est du « Charles Fourier ». Exprimer pleinement sa colère libère. Ne pas confondre la cause et le facteur déclenchant. Nous ne sommes jamais en colère à cause de ce que les autres disent ou font. La confusion entre cause et facteur déclenchant entretient la culpabilité. Ce sont nos pensées de reproche et de jugement qui déclenchent notre colère. Juger les autres débouche sur des prophéties qui se réalisent d’elles-mêmes. La résolution des conflits et médiation, c’est une connexion de cœur à cœur. L’essentiel est de créer une connexion entre les gens. Lorsque les gens se relient de cœur à cœur, le problème se résout souvent tout seul. Éviter toute parole insinuant que l’un ou l’autre a tort. L’analyse intellectuelle est souvent perçue comme une critique. Sentir intuitivement les besoins des autres quoi qu’ils disent. Apprendre à entendre les besoins de l’autre personne, quelle que soit la manière dont elle les exprime. Critique et diagnostic entravent la résolution pacifique des conflits. Parler au présent et dans un langage d’action positif pour résoudre les conflits. Utiliser des verbes d’action. Le langage d’action nécessite l’utilisation de verbes d’action. La préservation du respect est essentielle pour résoudre un conflit avec succès. Traduire un « non » par une demande implicite. Votre rôle demande la confiance dans le processus de communication non violente. Rappelez-vous, il ne s’agit pas de soi. L’objectif n’est pas d’amener les parties à faire ce que nous voulons.
Lorsque le recours à la force est inévitable, dans quel esprit recourt-on à la force ? Les deux usages de la force sont la protection et la répression. L’usage protecteur de la force vise seulement à protéger et non à punir, accuser ou condamner. La peur du châtiment corporel empêche l’enfant de percevoir la bienveillance inhérente aux exigences de ses parents. Les étiquettes défavorables sont aussi des punitions, de même que la privation de certains privilèges. Lorsque nous craignons d’être punis, nous ne pensons plus qu’aux conséquences au lieu de nous centrer sur nos propres valeurs. La crainte de la punition compromet l’estime de soi et la bonne volonté. Il faut se demander : « que voudrais-je que cette personne fasse ? Quelle motivation voudrais-je que cette personne ait pour le faire ? » Exprimer sa reconnaissance. Les trois composantes d’un remerciement : « voici ce que tu as fait, voici ce que je ressens, voici le besoin qui chez moi a été satisfait ». Recevoir l’appréciation sans sentiment de supériorité ni fausse modestie. Se méfier de la soif de reconnaissance. Nous avons tendance à remarquer davantage ce qui ne va pas que ce qui va bien. Prendre pour soi la théorie de la justice ou la Justice comme équité : Premier principe, chaque personne a un droit égal au principe total le plus étendu de liberté de base égale pour tous, compatible avec un même système pour tous. Second principe, les inégalités économiques et sociales doivent être telles qu’elles soient : a) au plus grand bénéfice des plus désavantagés dans la limite d’un juste principe d’épargne, b) attachées à des fonctions et à des positions ouvertes à tous, conformément au principe de la juste égalité des chances.
La Stylistique : C’est la façon dont on utilise le jeu des connotations et des dénotations dans le discours. Les connotations : sens particulier ou effet de sens (d’un mot, d’un énoncé) qui vient s’ajouter au sens ordinaire selon la situation ou le contexte.
Dénotation : ensemble des traits distinctifs qui objectivement caractérisent cette classe, c’est ce qui correspond à son extension ou l’ensemble de ses sèmes génériques. Il est question aussi de savoir si avec la rhétorique nous avons à faire à un art de la persuasion ou de l’éloquence ? L’art des Sophistes est fait d’invention, d’art de trouver des arguments et des procédés pour convaincre, de bonnes dispositions dans l’art d’exposer des arguments de manière ordonnée et efficace avec une bonne élocution, trouver des mots qui mettent en valeur les arguments avec une diction claire et dynamique animant une prosodie enjouée, appuyée à une mnémotechnique personnelle qui porte sur le logos, le pathos et l’êthos tout à la fois. Socrate était la sage-femme de nous-mêmes par l’auto-suggestion de paraboles et hypotyposes nous ouvrant des horizons qu’il nous était jusqu’alors insoupçonnés et qu’il nous restait à peupler par une poétique du feu, de l’eau, de l’air et de la terre. La Stylistique est le bon versant d’une sophistique devenue propriété de la LTI. Parler avec style est le signe d’un esprit libre qui peut clamer à son tour :
« Mais cette fois-ci, je viens comme le Dionysos victorieux, qui fera de la Terre un jour de fête… » (Nietzsche)
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