Temps de lecture :












5- Les correspondances du monde, qui sont les correspondances des formes sont aussi celles de l’Âme qui mènent à la contemplation.
50– Le « traité des représentations et des correspondances » d’Emanuel Swedenborg nous révèle premièrement que la lumière du soleil physique possède une correspondance avec le ciel de l’esprit spirituel. Certains hommes ne sont capables de reconnaître ni la lumière du soleil, ni la lumière du ciel. D’autres ne voient que la lumière du soleil et d’autres sont aveuglés par la lumière du ciel spirituel, mais il en existe qui comprennent la correspondance entre soleil et ciel. Ainsi sont fondés les principes de la théosophie, sur les bases spirituelles de l’illuminisme de Swedenborg. Il nous révèle aussi que du Divin procèdent les célestes qui appartiennent au bien, des célestes procèdent les spirituels qui appartiennent au vrai, et des célestes et des spirituels procèdent les naturels ; ainsi par là on peut voir combien est grossière, et même combien est terrestre, et aussi combien a été renversée l’intelligence humaine qui attribue toutes choses à la Nature séparée ou privée d’un influx antérieur à elle, ou d’une cause efficiente.
De là naît l’idée de la Théosophie moderne popularisée par le polygraphe philologue Rudolf Steiner (les polygraphes sont souvent polymathes, un bon exemple étant Goethe). Nous retrouvons l’origine du terme chez les philosophes d’Alexandrie, les philalèthes, c’est-à-dire « Ceux qui aiment la vérité », et cette vérité qui est pour eux une vérité de l’Âme est aussi une vérité de la Forme (le poète Ovide voyait dans le paysage un visage et dans un visage le paysage).
51— Swedenborg, en 1744, ne faisait que relater sans le savoir des principes de la logique formelle, illustrant selon un ordre logique que le physicien David Bohm nous développe au travers de son ordre génératif du monde, que l’on peut comprendre par une analogie au langage parlé et qui s’étendrait « du langage trivial jusqu’à la prose », ceci correspondrait pour Swedenborg au ciel terrestre naturel avec sa lumière du soleil. Un ordre implicite à l’ordre génératif qui va du « langage structuré comme peut l’être un logos (logos égal raison, cohérence logique) ou comme un aphorisme nietzschéen jusqu’à la poésie », correspondant au ciel spirituel intérieur et au langage qu’utilisent les anges représentant le domaine du vrai. Un ordre surimplicite inclus dans l’ordre implicite qui va « de la poésie au langage des oiseaux » (le « langage des oiseaux » est une expression pour parler d’un langage de nature tacite codé implicitement et compris sans l’accord préétabli du destinataire), correspondant au ciel céleste habité des célestes qui, au tréfonds de nos âmes, agissent pour le domaine du Bien, et enfin le niveau surimplicite de second niveau qui est le domaine des Divins (un esprit divin étant l’équivalent du concept de Grande Créode en biologie et en anthropologie ou un archange pour un mystique, c’est-à-dire un super-archétype), domaine de langage étant pour tout esprit naturel, spirituel ou céleste difficilement accessible du fait de sa plus grande « profondeur logique » (profondeur logique égal valeur d’une information nouvelle, d’un « rhème », fortement consistant, équivalant à une révélation) et au-delà la cause première. C’est l’axiome qui relie ! Un méta-langage représentant le langage de tous les langages. C’est ainsi qu’il est dit « La logique est Dieu et Dieu est logique », mais surtout n’oubliez pas que nous découvrons seulement ce que veut dire logique et nous n’avons aucune idée de ce que signifie Dieu.
52- Charles Fourier est loin de se contenter de cette seule clé de compréhension. Outre ses qualités hors pair de cracheur de pochades littéraires sur tous les petits dénis et travers de la civilisation, faisant œuvre d’anthropologue, il retrace les avantages et inconvénients des diverses civilisations au fil des âges, plaçant son époque au summum de la sophistication de l’hypocrisie face à la réalité du sort de chacun. Il pensait qu’il allait lui falloir une autre clé ! Il l’a trouvée dans le principe des proportions liées aux analogies, en partie dans la théorie des sphères d’Aristote et en partie dans les principes de la théosophie antique.
C’est que monsieur Fourier avait l’esprit particulièrement subtil et sophistiqué, ne supportant pas l’expression grossière. Il exigeait de ses pairs une esthétique du langage et une certaine exigence dans la rigueur des faits qui sont le gage d’une relation sociale de qualité. De son œuvre prolifique, qui n’est toujours pas exhumée en totalité, nous pourrons encore en tirer un large propos sortant des étonnantes intuitions d’une psychologie sociale largement éprouvée et justifiée par l’épreuve du temps. Psychologie sociale bâtie sur les fondements de la nature d’un homme en quête de vérité, déconnecté de sa Grâce, mais en voie de résurrection. De la lecture des écrits mystiques de Swedenborg, Charles Fourier en gardait-il une quelconque foi ? Je suppose que non. Les Dieux nous envient, nous sommes les enfants gâtés des dieux, nous les Naturels. Ils nous envient la beauté et la force du tragique de notre condition de mortel, la pertinence du fait réel dans l’instant et le spontané, puis finalement envie notre façon d’assumer nos responsabilités d’humain sur cette terre. Les esprits et les anges nous précédaient, si l’on comprend la lecture des « Archives Akashiques ». Ils ont tous goûté à l’état naturel, et cet état leur manque dès lors comme un âge d’or. La spiritualité n’a de sens que de notre vivant, indépendamment du sens que l’on pourrait lui donner, la suite risque de n’être que regrets pour une âme immortelle. Charles Fourier l’avait compris et considérait que le royaume des dieux c’est ici et maintenant en mettant en application les lois et les règles de la sensibilité humaine. Tel est le sens du Socialisme Utopique.
53- En 1945, André Breton nous tient un bilan de notre civilisation au regard des considérations de Charles Fourier, il détaille :
État des ressorts de la sensualité
1- Le Tact : a) sur le plan des faits tangibles – hiver d’une rigueur jusqu’alors inconnue en Europe : destruction des foyers, pénurie de vêtements, abaissement calorique dû à la sous-alimentation, b) dans le domaine des idées « expliquer c’est identifier », mais expliquer = rechercher la vraie réalité. Or, plus on traque de près cette réalité, plus elle se dérobe. L’école : « L’effort réaliste en quête de l’authentique nature physique aboutit en fin de compte à un immatérialisme. »
2- La Vue : a) vers l’extérieur, elle est déchirée de toutes parts, les camps de concentration, les bombardements massifs l’ont tenue à l’extrême limite du supportable b) vers l’intérieur, elle venait de se découvrir tout un nouveau continent dont l’exploration se poursuivra, grands repères déjà pris en psychopathie et en art.
3- L’Ouïe : obstruée systématiquement par le caquetage le plus éhonté et le plus nocif de tous les temps, « radiophoniquement ». Une note poétique en plein « discord poste » du mont Everest.
4- Le Goût : a) langue et palais, rétrogradation de la gastronomie cabalistique au-delà de l’enfance de la terre par retrait pur et simple de tous les comestibles qui n’étaient pas réservés au bétail. Premier accès de convoitise à l’apparition de la conserve américaine qui sauvegarde du moins la belle apparence du petit pois. b) au sens du discernement du beau … passons.
5- L’Odorat : On n’a pas surpassé les parfums de Paris.
État des ressorts affectueux
6- L’Amitié : En croissante et presque complète aliénation d’elle-même. Une des malédictions d’aujourd’hui : qu’aux plus rares affinés, aux accords initiaux les plus vastes sur lesquels se fonde l’amitié entre deux êtres succède au moindre frottement comme par renversement de signe un antagonisme sans appel qui porte aux mouvements les plus contradictoires et dans les cas de plus vive rancœur va jusqu’à fausser le témoignage de leur vie. Maladie à étudier : elle affecte d’autant plus la collectivité qu’elle frappe de préférence des individus placés en vedette.
7- L’Amour : Je ne m’explique pas ce qui t’a fait occulter ici le Grand Brillant et nous tendre une perle baroque mais « l’attraction passionnée » ou révélation sociale permanente n’en est pas moins la projection enthousiaste de ce brillant dans toutes les autres sphères. Vérité embryonnaire en philosophie moderne : « Celui qui n’aime que l’humanité n’aime pas, mais bien celui qui aime tel être humain déterminé », c’est au plus haut en période de l’amour électif pour tel être que s’ouvrent toutes grandes les écluses de l’amour pour l’humanité non certes telle qu’elle est mais telle qu’on se prend à vouloir activement qu’elle devienne. Accorder sans autre chicane au même auteur que « c’est dans le fait d’être soi-même de la façon la plus décisive que prend racine notre amour le plus pur pour la nature ».
8- L’Ambition : Babiolisme, la tombola infernale de la guerre a eu pour effet dérisoire de combler les adultes des satisfactions que tu proposais d’accorder à un enfant de trois ans, haut lutin, il aurait déjà pour le moins une vingtaine de dignités et décorations, comme celles de : « Licencié au groupe des allumettes, Bachelier au groupe d’égoussage, Néophyte au groupe du réséda, etc…etc… avec ornements distinctifs de toutes ces fonctions. Certaines prétentions non moins puériles mais plus inquiétantes n’impliquant pas aujourd’hui le port extérieur de rubans.
9- La Famille : Lieu actuel de culmination du système deux poids deux mesures : fils à papa et enfants perdus. Dans l’œil vacillant du serf l’aplomb du château féodal. La famille ressort d’aparté, de piétinement, d’égoïsme, de vanité, de division, d’hypocrisie et de mensonge tel que le sanctionne le scandale persistant et sans égal de l’héritage.
État des passions mécanisantes, « engrennantes » de la société
10- La Cabaliste : Vient d’être assujettie en masse aux cadres les plus contraires à sa raison d’être, aussi désadaptée que possible du besoin de consommation, de préparation et de production qui peut la motiver. L’esprit du lendemain ne hasarde pas plus de trois poils de moustache hors du terrier. Maigre feu d’artifice. Haute feuille d’acanthe de l’ornière.
11- La Composite : À peine moins rétive à se reconnaître. Encore sous le coup de l’invitation peu déclinable à penser sur commande, tout au moins à se mouvoir par rangs arbitraires, aux creux impalpables. Tout à retrouver, à rapporter au réseau de la solidarité humaine.
12- La Papillonne : Cris du sphinx Atropos. Travaille à la chaîne.
54— « Ô Charles Fourier !
Fourier qu’a-t-on fait de ton « clavier ».
Qui répondait à tout par un accord Réglant au cours des étoiles jusqu’au grand écart du plus fier trois-mâts depuis les entrechats de la plus petite barque sur la mer
Tu as embrassé l’unité tu l’as montrée non comme perdue mais comme intégralement réalisable
Et si tu as nommé « Dieu » ça a été pour inférer que ce dieu tombait sous le sens (Son corps est le feu)
Mais ce qui me débuche à jamais la pensée socialiste
C’est que tu aies éprouvé le besoin de différer au moins en quadruple forme la virgule.
Et de faire passer la clé de sol de seconde en première ligne dans la notation musicale.
Parce que c’est le monde entier qui doit être non seulement retourné mais de toutes parts aiguillonné dans ses conventions.
Qu’il couvre de plus belle la cécité scientifique. « Personne n’a jamais vu de molécule, ni d’atome, ni de lien atomique et sans doute ne les verra jamais ».
Prompt démenti : entre en se dandinant la molécule du caoutchouc
Un savant, bien que muni de lunettes noires, perd la vue pour avoir assisté à plusieurs milles de distance aux premiers essais de la bombe atomique.
Fourier je te salue du Grand Canyon du Colorado
Je vois l’aigle qui s’échappe de ta tête Il tient dans ses serres le mouton de Panurge
Et le vent du souvenir et de l’avenir
Dans les plumes de ses ailes fait passer les visages de mes amis
Parmi lesquels nombreux ceux qui n’ont plus ou n’ont pas encore de visage
Parce que persistent on ne peut plus vainement à s’opposer les rétrogrades conscients et tant d’apôtres du progrès social en fait farouchement immobilistes que tu mettais dans le même sac
Je te salue de la Forêt Pétrifiée de la culture humaine
Où plus rien n’est debout Mais où rôdent de grandes lueurs tournoyantes
Qui appellent la délivrance du feuillage et de l’oiseau
De tes doigts part la sève des arbres en fleurs
Parce que disposant de la pierre philosophale
Tu n’as écouté que ton premier mouvement qui était de la tendre aux hommes
Mais entre eux et toi nul intercesseur
Pas un jour qu’avec confiance tu ne l’attendisses pendant une heure dans les jardins du Palais-Royal.
Les attractions sont proportionnelles aux destinées
En foi de quoi je viens aujourd’hui vers toi
Je te salue du Névada des chercheurs d’or
De la terre promise et tenue
À la terre en veine de promesse plus hautes qu’elle doit tenir encore
Du fond de la mine d’azurite qui mire le plus beau ciel
Pour toujours par-delà cette enseigne de bar qui continue à battre la rue d’une ville morte Virginia-City, « Au vieux baquet de sang »
Parce que se perd de plus en plus le sens de la fête
Que les plus vertigineux autoroutes ne laissent pas de nous faire regretter ton trottoir à zèbres
Que l’Europe prête à voler en poudre n’a trouvé rien de plus expédient que de prendre des mesures de défense contre les confettis
Et que parmi les exercices chorégraphiques que tu suggérais de multiplier Il serait peut-être temps d’omettre ceux du fusil et de l’encensoir
Je te salue de l’instant où viennent de prendre fin les danses indiennes Au cœur de l’orage
Et les participants se groupent en amande autour des brasiers à la prenante odeur de pin-pignon contre la pluie bien aimée
Une amande qui est une opale Exaltant au possible ses feux rouges dans la nuit
Parce que tu as compris que l’état surcomposé ou supra-mondain de l’âme, qu’il ne s’agit plus de reporter à l’autre monde mais de promouvoir dans celui-ci, devait entretenir des relations plus étroites avec l’état simple inframondain, le sommeil, qu’avec l’état composé ou mondain, la veille, qui leur est intermédiaire
Je te salue de la croisée des chemins en signe de preuve et de la trajectoire toujours en puissance de cette flèche précieusement recueillie à mes pieds : « Il n’y a pas de séparation, d’hétérogénité entre le surnaturel et le naturel, le réel et le surréel.
Aucun hiatus.
C’est un « continuum », on croit entendre
André Breton C’est un ethnographe qui nous parle au nom des Indiens Saulteux.
Parce que si le serpent à sonnettes était une de tes bêtes noires, du moins tu n’as pas douté que les passions, sans en excepter celles que la morale fait passer pour les plus indignes égarements de l’esprit et des sens, constituent un cryptogramme indivisible que l’homme est appelé à déchiffrer
Et que tenant pour hors de question que la nature et l’âme humaine répondent au même modèle Dare-dare tu t’es mis en quête de repères dans le potager
Je te salue du bas de l’échelle qui plonge en grand mystère dans la kiwa hopi, la chambre souterraine et sacrée de ce 22 août 1945 à Mishongovi à l’heure où les serpents d’un nœud ultime marquent qu’ils sont prêts à opérer leur conjonction avec la bouche humaine
Du fond du pacte millénaire qui, dans l’angoisse, a pour objet de maintenir l’intégralité du verbe Des plus lointaines ondes de l’écho qu’éveille le pied frappant impérieusement le sol pour sceller l’alliance avec les puissances qui font lever la graine
Fourier tranchant sur la grisaille des idées et des aspirations d’aujourd’hui ta lumière
Filtrant la soif de mieux-être et la maintenant à l’abri de tout ce qui pourrait la rendre moins pure quand bien même et c’est le cas je tiendrais pour avéré que l’amélioration du sort humain ne s’opère que très lentement par à coups au prix de revendications terre à terre et de froids calculs le vrai levier n’en demeure pas moins la croyance irraisonnée à l’acheminement vers un futur édénique et après tout c’est elle aussi le seul levain des générations, ta jeunesse
Si la série des cerisistes est en nombreuse réunion à son grand verger, à un quart de lieue du phalanstère, il convient que, dans la séance de quatre à six heures du soir, elle voie se réunir avec elle et à son voisinage :
Une cohorte de la phalange voisine et des deux sexes, venue pour aider aux cerisistes,
Un groupe de dames fleuristes du canton, venant cultiver une ligne de cent toises de Mauves et Dahlia qui forment perspective pour la route voisine, et bordure en équerre pour un champ de légumes contigu au verger,
Un groupe de la série des légumistes, venu pour cultiver les légumes de ce champ,
Un groupe de la série des mille fleurs, venu pour la culture d’un autel de secte, placé entre le champ de légume et le verger de cerisiers,
Un groupe de jouvencelles fraisistes, arrivant à la fin de la séance, et sortant de cultiver une clairière garnie de fraisiers dans la forêt voisine.
À cinq heures trois quarts, des forgerons suspendus partis du phalanstère amènent le goûter pour tous ces groupes : il est servi dans le castel des cerisistes, de cinq heures trois quarts à six un quart, ensuite les groupes se dispersent après avoir formé des liens amicaux et négocié des réunions industrielles ou autres pour les jours suivants.
Pointant sur le champ d’étoiles la main hardiment portée vers la ruche où la reine Herschel rassemble ses satellites connus et non encore découverts en haine irréductible de la frustration en tous genres qui découvre à la honte des sociétés les plus arrogantes le visage noirci d’un enfant près d’un four d’usine et s’abîme dans la douceur des coups frappés par l’horloge de Pol de Limbourg, ton tact suprême dans la démesure.
Au grand scandale des uns sous l’œil à peine moins sévère des autres soulevant son poids d’ailes, ta Liberté.
Téléchargez le Pdf ➤➤➤ Suite du texte ➤➤➤
